De l’inefficacité des DRM

De nombreux exemples ont déjà montré l’inefficacité des systèmes à base de DRM. Il suffit de voir toutes les tentatives ratées par les éditeurs de protéger leurs contenus. Pire, dans certains cas, l’adoption des DRM semble même forcer le destin ! Du coup, les industries les plus touchées décident finalement de faire marche arrière. En effet, pourquoi payer si cher pour quelque chose d’inefficace ?

Les nouveaux arrivants dans l’univers du numérique (notamment les éditeurs de livres) sont malheureusement tentés de suivre la même voie, sans doute influencés par le discours catastrophiste de ceux-là mêmes qui fabriquent les DRM. Quand on sait le prix facturé pour la mise en place de DRM, on ne peut que comprendre pourquoi les livres numériques coûteraient plus cher que les livres papiers.

Ils sont pourtant voués au même sort que leurs prédécesseurs. Il ne faudra ainsi que 10 minutes montre en main pour convertir un fichier ePub avec DRM en un fichier imprimable et copiable — si vous ne nous croyez pas, envoyez-nous l’un de vos fichiers DRMisés (uniquement si vous êtes éditeur, bien sûr !). Le jeu en valait-il la chandelle ?

Le problème n’est finalement pas que l’œuvre immatérielle se retrouve un jour quelque part illégalement sur le web, car il y a de fortes chances pour que ce soit le cas de toute façon (et même précipité par l’utilisation de DRM comme on l’a vu plus haut). La priorité nous semble plutôt être d’éliminer les freins qui retiennent inutilement le lecteur d’acquérir une œuvre sous forme numérique.

Nous considérons chez immatériel.fr qu’un simple tatouage numérique (ou watermark, ou ex-libris comme le propose Alain Pierrot) constitue une protection bien plus efficace que les DRM.  Non pas par la difficulté technique de son contournement, mais parce que l’éditeur pourra ainsi favoriser un rapport de confiance avec son client, plutôt qu’un rapport de défiance qui mènera inévitablement au piratage.

Mieux, il nous semble maintenant évident que l’avenir du numérique ne se trouve pas dans la vente de contenus à proprement parler, mais bel et bien de services. En partant du principe que tout contenu court le risque se retrouver un jour déposé illégalement sur le Réseau, l’invention de nouveaux services et moyens d’accès originaux semble le meilleur moyen de lutter contre le piratage.
Nous expérimentons nous même ce genre de services avec notre liseuse web. Celle-ci permet de construire un service autour du livre, ou plutôt autour d’une bibliothèque personnelle. Grâce à un moteur de recherche dans un ensemble de titres, mais également à une interaction via des annotations privées ou partagées, l’utilisateur découvre une nouvelle manière d’accéder à la lecture.

D’autres plate-formes suivent le même principe, et expliquent très bien (en anglais) pourquoi ça fonctionne.

julien@immateriel.fr

16 Réponses to “De l’inefficacité des DRM”


  1. 1 Hubert Guillaud 4 Mai 2009 à 10:44

    On ne peut-être que pleinement d’accord Julien.

  2. 2 Renaud 4 Mai 2009 à 16:06

    Précisions :

    La suppression du watermark est tout aussi aisée que la suppression du DRM me semble-t-il.
    Peut-on savoir quelle(s) information(s) est(sont) utilisée(s) pour le watermark ?

    La lecture en ligne est effectivement le meilleur moyen (le moins mauvais) actuellement de se prémunir contre la copie des œuvres numérisées sous droit. Bien qu’on puisse toujours – dans le cas le plus défavorable, car il existe peut-être d’autres solutions plus simples à mettre en œuvre – numériser un contenu affiché à l’écran. En fait l’effort déployé par le copieur dépendra de la valeur ce de qui est affiché à l’écran.

    Dans le cas de la lecture en ligne, on ne peut pas prêter l’exemplaire que l’on a acheté – l’acheteur n’est d’ailleurs pas propriétaire d’un exemplaire – sauf à le renumériser. Cela s’apparente donc à un abonnement ou à une location, contrairement aux fichiers DRMisés. (Et bien que les DRM puissent interdire la lecture au bout d’un certain temps et limiter le nombre de copies. Qui peut le plus, peut le moins.)

    Système davantage adapté aux ouvrages techniques (informatique) me semble-t-il et dont l’abonnement sera supporté principalement par des personnes morales.

    Cdt

    • 3 julien@immateriel.fr 4 Mai 2009 à 20:40

      La suppression du watermark est, tout d’abord, moins intéressante que le contournement de DRM, car les fonctionnalités que l’on peut espérer d’un titre numérique (copier, imprimer) sont déjà disponibles. De plus, dépenser de l’argent pour quelque chose d’aussi facile à contourner augmente inutilement le coût de distribution.
      Pour répondre à votre question, nous appliquons nom prénom et adresse email à nos watermarks.

      L’idée de lecture en ligne implique évidemment que ce « service » ne se limite pas uniquement à la lecture ! L’annotation et la recherche multi-ouvrages sont un plus, ainsi qu’avoir une bibliothèque qui s’enrichit dans le temps, comme on peut le voir dans l’offre publie.net. Ce qui montre au passage que cette approche n’est pas forcement réservée aux livres techniques.

      • 4 Renaud 4 Mai 2009 à 22:15

        Si j’avais mes nom, prémon et courriel sur un fichier numérique et que je souhaitais partager largement mon fichier, je trouverais intéressant de savoir que je peux les supprimer (au même titre que les DRM).
        D’autre part, sauf erreur, la possibilité de copier, imprimer, etc. avec les DRM dépend de choix en amont. Il se peut que le copier, imprimer à partir d’un fichier numérique soit autorisé même avec DRM.

        Je n’ai pas dit que cette approche était « forcément » réservée aux livres techniques, mais « davantage adaptée, me semble-t-il », notamment du fait de la fonctionnalité de recherche.

        Y a-t-il possibilité de tester les services pour se rendre compte ? Mieux, existe-il une vidéo de démo, par exemple ?

        Cdt

      • 5 xavier@immateriel.fr 5 Mai 2009 à 20:42

        @Renaud : vidéo de démo, oui, on y songe fortement 🙂 Et même démo tout court, c’est aussi à ça que ça peut servir, les livres gratuits… Stay tuned 🙂

  3. 6 Renaud 4 Mai 2009 à 18:12

    Dans le précédent commentaire, j’ai un peu zappé l’aspect « services » est effectivement intéressant, un peu dans l’esprit bureau virtuel + plateforme collaborative.

  4. 7 Renaud 6 Mai 2009 à 10:44

    @Xavier : Ça marche. A suivre alors.

  5. 8 Alexis 26 Mai 2009 à 19:11

    DRM Inefficace oui mais toujours mieux que rien …
    Sans vouloir être pessimiste le « rapport de confiance » n’existe pas aujourd’hui car pour beaucoup de gens téléchargent des œuvres musicales (mp3) en p2p ou autre sur le net, alors qu’il existe de multiples façons d’acheter ces mêmes musiques en rémunérant les créateurs.
    En la matière, pour moi, l’éditeur est tenu à une obligation de MOYENS mais non pas de résultats, car impossible, afin de protéger l’œuvre de son auteur. Le donner sans protections reviendrait à dire « A votre bon cœur messieurs dames! »

    • 9 julien@immateriel.fr 26 Mai 2009 à 21:27

      @Alexis
      Précisons les choses : il ne s’agit pas d’une absence de protection, il s’agit de trouver un compromis : le watermark, en plus d’être moins contraignant pour le lecteur, protège le droit d’auteur en responsabilisant le client. Les éditeurs de musique et video utilisent d’ailleurs cette méthode, après avoir renoncé aux DRM.

      Il ne nous semble donc pas qu’il y ait laxisme sur les moyens, et la question est de savoir s’il faut privilégier des systèmes très contraignants (autant pour l’éditeur que pour l’utilisateur final), quitte à limiter les ventes, ce qui lèserai bien plus l’auteur ?
      Ainsi un fichier avec les DRM d’Adobe ne pourra être lu que sur un ordinateur, ou sur un appareil déchiffrant ce type de DRM (uniquement le Sony Reader en l’occurrence). Pire, il sera illisible sur la majorité des téléphones mobiles qui sont de plus en plus utilisés à ces fins. De nombreux clients potentiels seront ainsi écartés faute de pouvoir le lire.

      Vous prenez l’exemple de la musique : ici l’erreur des éditeurs semble avoir été de laisser s’enraciner une offre illégale en ne proposant, au début, aucun fichier, puis des fichiers DRMisés à outrance. L’offre illégale était donc beaucoup plus attrayante et facile d’accès, jusqu’à devenir aujourd’hui une habitude. L’avantage de l’édition du livre aujourd’hui est que le piratage reste insignifiant, aux éditeurs de prendre les devants, en ne faisant pas les mêmes erreurs que celles de l’industrie de la musique.

      • 10 Christophe Turbout 3 février 2010 à 22:14

        Penser que c’est l’absence d’offre légale qui a provoqué la « chute » des DRM sur la musique est méconnaitre la situation. Ce qui tue les DRM c’est :

        1) la lourdeur techniques de la mise en oeuvre et de la gestion à long terme des DRM
        2) l’impossibilité pour l’acheteur légal de faire usage de son achat comme bon lui semble (dans la limite de la légalité de la licence ie, le lire sur le support physique qu’il souhaite)

        c’est ce qui a tué les DRM sur la musique …

        Entre la disponibilité gratuite sur le p2p et la restriction d’usage de l’acheteur, il y a un juste milieu :
        le tatouage (watermarking)… on laisse à l’utilisateur la possibilité de prêter son livre à son copain mais il sait que s’il le met sur un réseau p2p il aura un problème et pourra être attaqué.

        Pour moi c’est la seule solution qui garde un modèle économique viable et rend la liberté d’usage.

    • 11 xavier@immateriel.fr 26 Mai 2009 à 22:30

      @Alexis Il est vrai que la loi sur le droit d’auteur ne facilite pas les choses [Rappel pour ceux qui nous lisent : un éditeur pourrait théoriquement être condamné pour complicité de contrefaçon si un auteur arrivait à convaincre un juge que les fichiers piratés n’étaient pas assez protégés] Donc, si vous nous demandez de distribuer vos fichiers en leur appliquant des DRM, nous le ferons bien sûr, en sachant qu’on vous protège vous, plus que vos ouvrages 🙂

      Tant que les quantités vendues se limiteront comme aujourd’hui à quelques dizaines d’exemplaires, nous considérons que le numérique coûtera aux éditeurs plus cher qu’il ne leur rapporte . Et on ne parle pas de la redistribution des revenus, qui de facto ne peut pas être pensée.

      Or ces verrous limitent les quantités vendues, tout en augmentant les coûts pour l’éditeur, donc le prix demandé au lecteur, ce qui est un facteur aggravant. Au final, il nous paraît plus logique de ne pas publier de livres numériques que de les publier avec des verrous…

      Heureusement, dans certains cas particuliers, comme la vente de licences aux grands comptes ou aux bibliothèques, où la protection des contenus a un sens, d’autres systèmes tout aussi efficaces s’avèrent plus pertinents, et porteurs de valeur ajoutée. Ces liseuses en ligne fonctionnent aussi très bien sur des ouvrages à l’unité, mais ont l’inconvénient, pour l’instant, de n’être utilisables que sur un terminal connecté à l’Internet.


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