Dans un article du Monde daté du 23 avril 2008, on apprend que l’éditeur allemand Bertelsmann prévoit de sortir une version papier de l’encyclopédie Wikipédia. Le contenu sera sélectionné par l’éditeur, vérifié et éventuellement corrigé. Une édition annuelle à 19,95 euros est prévue et la sélection d’articles promet de varier chaque année.
Qu’en penser ? Tout d’abord, selon l’éditeur, Wikipedia est l’encyclopédie qui colle au plus près de l’actualité, ce qui justifie sa place au format papier au milieu des autres ouvrages de ce type, cela ne surprendra personne, on pourrait même ajouter que c’est bien l’un des avantages du numérique par rapport au papier. Par ailleurs, la fondation Wikipedia est avant tout un projet ouvert, axé sur une libre contribution ; Bertelsmann s’engage à lui reverser 5% de droits et à se porter garant de la validité du contenu. C’est bien joué de la part de l’éditeur, car si l’on peut lui objecter l’opportunisme de se servir du travail d’autrui pour ses propres affaires, il est plus hasardeux de le critiquer sur son engagement à corriger le contenu si ce n’est sur un point : ces corrections profiteront-elles à la communauté wikipedia ou bien resteront-elles la propriété exclusive de la version papier ?
Maintenant, cela suscite quelques pistes de réflexion alors que l’on parle beaucoup de passer du papier au numérique, cette démarche se situe à contre-courant. Un peu comme des mélomanes qui brûleraient leurs CD pour repasser au vinyl :
- En quoi la démarche de Bertelsmann préfigure-t-elle l’abolition à terme des frontières papier/contenus dématérialisés ?
- le papier est-il redondant vis-à-vis des contenus numériques et inversement
Il est vrai que l’on se focalise beaucoup sur le passage au numérique, en oubliant au passage que l’essentiel de la production éditoriale commerciale est toujours au format papier. Dans le cas le Wikipedia, il est intéressant de noter que si les internautes ont toujours eu l’expérience d’une navigation en ligne, d’un lien à un autre, il est peu probable qu’ils aient pu aborder cette encyclopédie comme on le fait en version papier, c’est-à-dire en la feuilletant. Drôle d’idée me direz-vous et pourtant comment expliquer le succès de librairie des Miscellanées de Mr Schott si ce n’est par le plaisir de feuilleter un cabinet de curiosités.
Car il s’agit bien de cela : une encyclopédie dont les articles sont sélectionnés annuellement par un éditeur ne sont rien d’autre qu’un ensemble de miscellanées, une sorte d’almanach comme au bon vieux temps et dont la source est numérique ! Ainsi, Bertelsmann emboîte le pas à tous les éditeurs qui ont, il n’y a pas si longtemps proposé à certains auteurs de blog d’en faire une édition papier. D’ailleurs, il faut s’attendre à voir de plus en plus souvent de bonnes idées au format numérique avoir les honneurs du papier. Le site de Joe la Pompe qui fait régulièrement les délices des amateurs de publicité et de plagiat aura bientôt droit lui aussi à sa version papier. Alors après le roman adapté en film, le site adapté en livre ? Ainsi, la numérisation des contenus au format papier n’exclu pas l’opération inverse, bien au contraire.
Pour autant, les deux formats sont-ils redondants ? Les lecteurs de feu O’Reilly France vous le diront, pour eux les deux formats cohabitent et possèdent chacun leur utilité. Le papier se prête à une lecture soutenue, il peut s’emmener partout et se conserve bien. Le numérique, quant à lui, ne pèse rien, permet d’accéder aux liens hypertextes et aux références croisées en un clin d’œil, et pour les programmeurs, on peut copier/coller les exemples de code. Bien sûr, il s’agit d’ouvrages d’informatique, mais il suffit que chaque format tire parti de ses qualités intrinsèques pour que l’expérience soit enrichie plutôt qu’inutilement redondante. Dans le cas de Joe la Pompe, le plaisir du papier sera de feuilleter les exemples de publicités plagiaires/plagiées en double-page, de l’avoir sous la main comme un bel objet ludique, tandis que le site visera davantage à l’exhaustivité des plagiats qu’à la sélection esthétique. La complémentarité des deux formats devrait donner des nouvelles perspectives aux métiers de l’édition qui devront faire preuve d’imagination et d’audace pour attirer de nouveaux lecteurs.
samuel@immateriel.fr
Non, ça n’est pas du tout cela …
Wikipedia est une encyclopédie en cours de rédaction et cela jusqu’à la fin des temps (si les gens cessent d’y contribuer, elle sera inachevée).
Sortir des presses, c’est simplement exister en tant qu’encyclopédie. Si WP était sortie en PDF payant, et corrigé de la même façon, on en aurait à peine moins parler.
Fort à parier que les corrections de Bertelsmann seront exclusives à la version papier. Les deux formats coexisteront de toute façon, si l’initiative de Bertelsmann s’avère rentable et donc réitérée chaque année.
Je pense que les éditeurs ont intérêt à s’approprier le web collaboratif, spécialement dans le domaine des connaissances : le collaboratif donne une complémentarité et une réactivité par rapport à ce qui se faisait jusqu’à maintenant.
Pour me part, j’ai trouvé cet article pertinent, j’avoue que c’est la référence à Mearsheimer, John J. (1990) “Back to the Future » qui m’a attiré.
Sinon je pense que Bertelsmann a choisi un très bon filon marketing.
Et pour cause, le public de cette encyclopédie selon moi ce n’est pas le public traditionnel des encyclopédies. Ni meme les initiés qui auront tendances à garder un apriori quant au contenu indépendament des éventuelles corrections. Non, le public c’est bien la generation des 15-25 ans qui sont “pratiquement” né avec wikipédia. Qui meme si il connaîsse les faiblesses de ce genre d’outil, l’utilise sans complexe.
C’est cette generation qui voudra une fois installée et salariée avoir elle aussi une belle encyclopédie dans son étagère. Choisira t’elle sur le prestige du passé : Larousse (qui cela dit en passant lance une offensive) ou alors sur la vertueuse découverte de leur jeunesse?
Moi personnelement je ne pense pas au contraire qu’il limitera les correctifs à la version papier, au contraire je pense qu’il aurait tout intérêt à en faire profiter le net. Car c’est le reproche numéro de wikipédia : la fiabilité. Une fois cet aspect revu et corrigé, il pourra “concquérir” les bibliothèques de monde.
@cr0vax : le simple fait de fixer une version de Wikipedia sur papier jusqu’à l’édition annuelle suivante me paraît remarquable. A l’heure actuelle, papier et numérique se font face avec la pérennité d’une édition figée sur son support et la variation incessante de l’autre, mais gageons que lorsque les e-readers auront gagné leurs lettres de noblesse, une simple actualisation des contenus par flux RSS ou autre comblera le fossé entre le deux types de contenus.
@Gautier Girard, le Web collaboratif commence à être perçu par les éditeurs comme un collectif d’auteurs, le principal problème du passage au papier est la répartition des droits d’auteur (en général sur la base d’un X% global réparti au pro-rata des interventions de chaque auteur), ce qui dans le cas d’un contenu libre comme celui de Wikipedia ne se pose pas.
@ezeetabi : il est sûr que pour Bertelsmann, Wikipedia est une marque à part entière bien identifiée par l’ensemble des lecteurs et non juste une nouvelle encyclopédie. Je profite de votre commentaire pour rebondir sur les deux récentes décisions de Larousse et du Quid de se publier en ligne. Cela paraît être un aveu d’impuissance de la part de leurs éditeurs respectifs à continuer à subsister au format papier, peut-être ont-ils l’impression que la concurrence du Net est trop forte pour que les lecteurs continuent à acheter régulièrement leurs encyclopédies. Pour Larousse, passer sur le mode collaboratif, c’est un peu vouloir prendre le train de Wikipedia en marche et s’exposer aux mêmes critiques que celle-ci. Après tout, Larousse n’est-il un gage de qualité de par son travail d’éditeur et le choix de ses auteurs ? Quant au Quid, il est difficile de percevoir son modèle économique au format électronique, tout du moins sans un accès payant ou de la publicité. En tout cas, la démarche de Bertelsmann est à l’inverse, et révèle potentiellement le rôle d’un éditeur en matière de choix des sujets, qui s’il est suffisamment pertinent, entraînera les lecteurs à acheter le millésime suivant.
Bonjour all
je suis desesperement a la recherche de ldap en francais biensur 🙂 pensez vous qu’on puisse encore le trouver quelque part ???
si oui ou !?
merci d’avance
gangan@zalteam.com si vous avez des infos